Les Formules Magiques

Lorsqu'on est confronté à un grimoire, à des talismans ou à des amulettes, le plus difficile est d'en comprendre le sens car, la plupart du temps, ceux qui les ont composés ont codé leurs textes ou leurs gravures en utilisant des formules obscures dont il n'est même pas certain qu'ils surent eux-mêmes ce qu'elles signifiaient.
Le profane est ainsi confronté à une succession de lettres, latines, grecques ou hébraïques, souvent mélangées les unes aux autres, à des noms barbares et inconnus.


Ces signes sont appelés «caractères» en latin. On peut aussi trouver des énumérations de noms de divinités, d'anges et de démons, ou de qualificatifs qui en sont les noms, entrecoupés de croix ou d'autres symboles.


Dans les charmes christianisés, les croix indiquent que le récitant de la formule doit se signer, ce qui est à la fois une façon de se protéger et de témoigner sa révérence aux puissances invoquées. Il ne faut jamais oublier qu'il est dangereux de mobiliser les forces occultes car, si l'on ne respecte pas strictement les rituels, on risque d'être mis en pièces par celles ci.


En outre le cryptage des données importantes est destiné à empêcher la divulgation du secret et son utilisation par n'importe qui. Le savoir est réservé aux spécialistes, quel que soit leur nom, devin, mage, sorcier, ou même prêtre. Aussi curieux que cela puisse paraître, les ecclésiastiques se sont adonnés à la magie, surtout à la magie météorologique.



La majeure partie des charmes qui nous sont parvenus nous ont été transmis par des formules fortement christianisées, merveilleux exemple de syncrétisme entre le paganisme et le christianisme. Les hommes n'ont jamais répudié le savoir des temps passés, bien au contraire ! Comme il a été censé avoir fait ses preuves, il a été précieusement et pieusement conservé, mais comme deux précautions valent mieux qu'une, des éléments de la vraie foi sont venus se superposer aux données anciennes. La structure des charmes ne change pas, seuls les termes évoluent. Jésus et les saints voisinent ainsi avec les divinités et les démons du paganisme.



En fait nous avons une véritable magie des mots et du verbe. L'atmosphère magique est créée non seulement par les vocables secrets, mais aussi par leur rythme, et les allitérations, l'homophonie, les palindromes, les acronymes épaississent le mystère. Il convient de ne rien changer au dire de la tradition sous peine de la rendre inefficace. La lecture de ces grimoires est ainsi difficile, leurs manuscrits sont au Moyen-Âge, écrits en abrégé et dans un latin très fautif, truffés de termes vulgaires et sommairement latinisés, aussi il n'est pas étonnant de trouver des distorsions et omissions dans la même formule au fil de sa transmission. C'est sans importance en fait, car l'utilisation des formules repose sur un acte de foi et nous croyons pouvoir affirmer sans grand risque d'erreur que l'utilisateur n'avait pas conscience de ces déformations, ne disposant pas de point de comparaison qui lui ait permis de découvrir que tel nom ou tel signe n'était pas concret.